Frédéric Geerts, lors de la création du CEMA, en 2014, les membres fondateurs ont eu cette conscience que l’Afrique était un acteur économique incontournable en devenir. Dix ans plus tard, les faits leur donnent entièrement raison. Quelle est la genèse de cette naissance du CEMA ?
Au départ, les cinq membres fondateurs commerçaient déjà avec divers pays d’Afrique. Nous étions donc particulièrement sensibles à la croissance de ce continent et observions son évolution avec attention. Les indices étaient multiples : une croissance démographique importante, une population parmi les plus jeunes du monde, une nouvelle génération très dynamique. Rendez-vous compte, le continent africain va doubler sa population d’ici 25 ans selon de sérieuses statistiques !
Nous avions alors organisé, dans le cadre du Festival du Printemps des Arts, la venue d’un orchestre de Kinshasa. Par la suite, cela a donné lieu à un échange avec un évènement culturel organisé dans la capitale de la République Démocratique du Congo à laquelle ont participé Monaco et les principaux membres fondateurs. De là est née l’idée de créer un club d’affaires, le CEMA, forme de passerelle entre entrepreneurs monégasques et africains.
En dix années, ce club d’affaires a largement évolué…
Nous fonctionnions effectivement comme un club d’affaires jusqu’en 2020, date à laquelle l’on m’a confié la présidence. Il m’a alors semblé important de faire évoluer le CEMA et de l’ouvrir à tout Monaco. Cette « architecture ouverte » permet des collaborations étroites, par exemple avec le Monaco Economic Board (MEB) ou la Fédération des Entrepreneurs Monégasques (FEDEM). Il y a deux ans, nous avons souhaité aller encore plus loin et avons créé l’Africa Day, une journée dédiée à l’Afrique en Principauté. La nouvelle et troisième édition se déroulera d’ailleurs le 11 octobre prochain.
Vous évoquez le MEB et la FEDEM. Vu de l’extérieur, l’on pourrait penser qu’il existe une forme de concurrence entre vos trois entités, et ce d’autant plus que, vous aussi, organisez également des « missions économiques ». Comment se passent les relations entre vous trois ?
Dès l’origine, nous invitions toujours MEB et FEDEM à nos évènements car nous ne nous posions pas en concurrent mais en complément. Chaque responsable des trois entités a immédiatement fixé la priorité : agir pour le développement et le rayonnement de Monaco. Nous sommes des partenaires œuvrant au service de notre pays. Le MEB et la FEDEM ont immédiatement mesurer l’outil que pouvait être le CEMA sur le continent africain. Nous travaillons de concert, la main dans la main. J’en veux pour preuve que, désormais, nous organisons nos évènements en partenariat avec le MEB qui nous fait profiter de son savoir-faire ainsi que de moyens matériels qu’il possède.
Vous l’avez dit vous-même, dix ans, c’est aussi l’heure symbolique du bilan. Quel est-il ?
En toute honnêteté, je dois dire que nous sommes très satisfaits. Des amitiés se sont consolidées au sein du club, les membres se sentent en confiance et n’hésitent pas à s’entraider, à consulter les autres, à demander du conseil.
De manière plus générale, le CEMA a permis d’ouvrir de nouveaux marchés pour nos entreprises monégasques, de créer de nouvelles opportunités. Aujourd’hui, il convient de rappeler que le continent africain est le deuxième partenaire économique de Monaco. J’ajouterais, pour rebondir sur la question précédente, que nous sommes également très heureux et fiers de ce partenariat avec le MEB qui nous offre d’ajouter notre pierre à l’édifice dans le développement de la Principauté à travers le monde ainsi qu’à son dynamisme entrepreneurial.
Les membres du CEMA sont désormais très présents en Afrique…
Effectivement. Nous avons largement renforcé notre présence puisque nous entretenons des relations avec 45 pays du continent, nos membres disposent de filiales dans plus de la moitié des pays d’Afrique pour un chiffre d’affaires atteignant environ deux milliards d’euros sur le continent africain. Cela signifie que dans 85% des pays d’Afrique existe souvent une présence monégasque, ou, pour le moins, des relations d’affaires.
Une Afrique qui, de plus en plus, se pose en partenaire économique incontournable…
C’est un continent qui va compter, c’est indéniable. La Chine et l’Inde l’ont bien compris. Elles ont une volonté d’implantation très forte sur ce continent. Le Moyen-Orient commence également à s’y intéresser, notamment pour les matières premières, la construction et bien d’autres secteurs. Les Américains, eux, restent très attentifs. L’Europe, quant à elle, doit se dynamiser sur ce point car il y a fort à craindre que se dessine une perte d’influence de cette Europe vis-à-vis de l’Afrique. Grâce à l’action conjuguée du MEB et du CEMA, l’on donne une image très volontaire de Monaco en Afrique.
Propos recueillis par Georges-Olivier KALIFA